lundi 30 novembre 2015

À voile et à vapeur

Une anthologie dirigée par Julien Morgan et Isabelle Wenta, publiée chez Voy’el uniquement en numérique.
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Présentation de l'éditeur :
De la science-fiction à la fantasy en passant par le fantastique, dix auteurs proposent leur vision d’un avenir du passé. Dans ce rétro-futur haut en couleurs, la vapeur et la voile cohabitent, le chevalier d’Éon use de charmes inattendus, des automates interrogent le tic tac de leur cœur mécanique et des élixirs permettent de changer de sexe à volonté. Embarquez à bord de la Vagabonde ou du Quatorze Sacs à Malice, destination la Russie, l’Afrique coloniale, Paris ou Londres, et partagez avec ces personnages les tourments et les plaisirs d’une vie à voile et à vapeur riche en aventures de tous genres – et sans distinction de genre...
Sommaire :
- Préface : Le Steampunk, ce puissant projecteur sur notre époque, Arthur Morgan
- Louise Geneviève de Beaumont de Tonnerre, Anthony Boulanger
- Dans les bras d’Orion, Céline Etcheberry
- Les mécanismes de l’errance, Alex Barlow
- Poupée de chiffons, Sophie Fischer
- Ceci n’est pas une histoire de tortue, Tesha Garisaki
- Une histoire d’éléphants, Isaac Orengo
- Du vent dans les voiles, Jean-Basile Boutak
- Histoire naturelle, Angou Levant
- Le pudding bavarois, Jarod Felten
- Suivez cette cathédrale !, Gareth Owens

Comme le titre le laisse deviner, il s’agit d’une anthologie Steampunk LGBT. Néanmoins, la prépondérance de l’un ou de l’autre peut varier selon le récit. Parfois le Steampunk n’est qu’un décor, d’autres fois c’est l’orientation sexuelle du ou des personnages qui n’est qu’un détail de l’histoire. De fait, les nouvelles sont assez diverses.
Fait rare avec les anthologies (les styles variés sont un atout, mais on ne peut pas toujours accrocher à chacun) : tous les textes ont été agréables à lire, même si tous ne font pas dans l’originalité et que j’en ai appréciés certains plus que d’autres.

Louise Geneviève de Beaumont de Tonnerre est un des textes que j’ai le plus appréciés pour son ambiance et son humour. Anthony Boulanger a choisi de mettre en scène un personnage connu, ce qui se révèle une très bonne idée. En outre, j’ai un faible pour les histoires d’espionnage. Je ne reprocherai qu’une chose à celle-ci : la fin arrive un peu trop brusquement et m’a fait l’effet d’un soufflé qui retombe.

Dans les bras d’Orion est un beau texte, très bien écrit, empreint de poésie et de nostalgie. Cependant, en ce qui concerne l’intrigue, c’est moins ma tasse de thé. De cette nouvelle je me rappellerai surtout le décor que l’auteur a su peindre de manière à le rendre très réel.
J’ai lu, il y a quelques temps, une autre nouvelle de Céline Etcheberry : 1888, et son style m’a marquée. C’est un auteur à découvrir.

En lisant Les mécanismes de l’errance, je dois admettre m’être plus intéressée au décor qu’au cœur du propos. Alex Barlow nous embarque à bord de La Vagabonde, un vaisseau stellaire. Un membre d’équipage y conte une histoire, que j’ai trouvée assez convenue. Cependant j’ai aimé Lincoln et j’aurais bien voulu en savoir plus sur elle, son vaisseau et son équipage.

Poupée de chiffons fait partie des nouvelles qui m’ont le moins marquée, même si ça reste une jolie histoire. Ce n’est tout simplement pas mon genre, trop de sentimentalisme à mon goût.

Ceci n’est pas une histoire de tortue est une de mes nouvelles préférées. Elle offre une vraie réflexion sur le genre et sur l’identité sexuelle. Le propos est intéressant, mais j’ai aussi beaucoup apprécié la façon dont il est mis en scène.

Une histoire d’éléphants est sans doute le texte qui m’a le plus déçue et ce probablement parce que j’en attendais autre chose. L’histoire démarrait bien et le décor piquait ma curiosité, mais on me promettait un mystère et au final il n’y en avait pas.

Du vent dans les voiles est l’un de mes textes favoris. Je l’ai trouvé très subtil dans sa façon de traiter de la norme (et de la normalité, ce qui n’est pas la même chose), de l’hypocrisie et de la notion d’accomplissement personnel.

Histoire naturelle marque surtout par son originalité. L’auteur ménage longtemps sa surprise, je ne vais pas la gâcher. Je regrette simplement de ne pas avoir su le fin mot de la naissance de l’aura et de ses conséquences.

Le pudding bavarois est pour moi l’un des meilleurs textes de cette anthologie. Totalement épistolaire, il demande au lecteur de réellement s’impliquer. Le récit se construit avec délicatesse et pudeur autour d’ellipses et allusions diverses. Il tient au lecteur de percevoir les changements d’attitude des personnages et l’évolution de leur relation rien qu’en décryptant leur correspondance.
J’ai vraiment beaucoup aimé cette nouvelle qui, en outre, n’est pas seulement sentimentale mais propose une vraie intrigue secondaire. La conclusion de cette dernière, avec la réelle nature d’Edwina, est toutefois laissée à l’interprétation du lecteur, ce qui n’est pas forcément un mal.

Suivez cette cathédrale ! clôt l’anthologie avec dynamisme. Ce texte est bourré d’action et très plaisant à lire, mais il apparaît comme le simple épisode d’une histoire qui aurait dû être développée davantage. C’est mon seul regret. De surcroît, j’aimais bien Pixie, le personnage principal, et il y a assez peu de femmes dans cette anthologie pour accentuer mon regret.

J’ai été très agréablement surprise par la variété des nouvelles présentes dans À voile et à vapeur et par l’étendue des thèmes traités. Je craignais surtout les clichés et finalement il y en a très peu. Il est toujours difficile de parler d’une anthologie sans trop décrire les textes pour ne pas gâcher la lecture, mais je vous recommande celle-ci car on y aborde des thèmes sérieux en n’oubliant pas d’être distrayant.
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Carton plein pour les challenges :

CRAAA

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vendredi 27 novembre 2015

Le Guide des Fées. Regards sur la femme

Un ouvrage thématique de Virginie Barsagol et Audrey Cansot, publié chez ActuSF.
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Présentation de l'éditeur :

Un parcours dans le temps à la rencontre des fées, des plus célèbres aux plus inattendues. Attraper les fées là où elles se cachent, des territoires littéraires aux œuvres cinématographiques en passant par la BD et la peinture, autant de champs que les reines du merveilleux ont investis au fil des siècles. La lecture du guide est aussi un voyage qui tente de révéler la profusion des regards portés sur la figure féerique, ainsi que son évolution, riche et complexe au fil des époques traversées.
Audrey Cansot, diplômée en cinéma à la Sorbonne, a travaillé pour la production cinématographique et écrit pour le théâtre.
Virginie Barsagol est certifiée de Lettres modernes et suit un cursus universitaire en psychologie.
Toutes deux collaborent à divers sites internet et revues.
Ce Guide des Fées a été l’une des premières publications des éditions ActuSF que j’ai achetées, il a de cela six bonnes années, et le voici maintenant disponible en numérique.

Le Guide des Fées de Virginie Barsagol et Audrey Cansot est un ouvrage d’introduction, concis mais complet, à l’histoire de la fée à travers les époques. Attention cependant, il est plus souvent question de fées littéraires que de Petit Peuple. Les auteurs ont choisi de suivre le fil chronologique, décrivant ainsi l’origine et l’évolution des fées depuis l’Antiquité, en se basant sur leurs ancêtres mythiques comme premières nées, jusqu’à nos jours.
Ce guide est parfaitement organisé et didactique. Il est aisé d’y trouver ce qu’on cherche, d’autant qu’une synthèse chronologique est disponible en fin de livre. Chaque période est constituée d’une introduction et de textes thématiques sur les tendances du siècle et les archétypes qu’y incarne la fée. On nous explique par exemple à quand remonte l’apparition des fées marraines ; on verra leur évolution au fil du temps dans d’autres fiches. Les représentantes célèbres de la gent féerique, ainsi que certaines de leurs sœurs un peu moins connues, ont également droit à une présentation succincte.
Une notice bibliographique fournie les accompagne toujours, présentant les textes où la fée apparaît directement comme indirectement. Y sont notées de même ses apparitions dans d’autres médias comme la musique ou la peinture ainsi que les références des fiches du livre dans lesquelles elle est mentionnée (des liens auraient été appréciables dans la version numérique, mais il est très facile de s’y retrouver avec les numéros de fiches). Si ce guide se veut un résumé permettant à l’amateur d’embrasser rapidement des siècles de féerie, on trouve toujours les références nécessaires pour approfondir le sujet grâce à d’autres ouvrages.
Ce Guide des Fées n’est pas exempt de quelques erreurs (dont une confusion entre Louis XIV et Louis XV) et de raccourcis discutables, mais demeure une bonne base pour se lancer à la découverte du Merveilleux français. Comme il est plutôt complet et syncrétique, même les connaisseurs pourront peut-être y apprendre quelque chose. C’est un ouvrage pratique, agréable à parcourir, destiné à tous ceux qui veulent aller voir au-delà du conte de fées.
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mardi 24 novembre 2015

Caver Den

Une novella de Xavier Portebois, publiée dans la collection e-courts.


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Caver Den est la première novella publiée dans la collection e-courts et j’espère qu’elle sera suivie de nombreuses autres tout aussi réussies.
Un accident contraint Linh à demeurer quelques temps sur Caver Den, une planète minière, un coin perdu parmi tant d’autres dans l’immensité de l’univers. Il n’a qu’une hâte : déguerpir. Mais pour rembourser ses soins et les réparations de sa moto, il doit enquêter sur la soudaine folie d’un animal et le neutraliser.
Les bases sont vites posées et on entre aussitôt dans le vif de ce récit qui mêle polar et science-fiction à justes doses. Outre l’enquête, le métier même de Linh nourrit l’intrigue et c’est, je pense, ce qui m’a le plus séduite. Je n’en dirai pas plus pour ne pas vous gâcher la lecture, mais sachez que son animal de compagnie est une pieuvre sylvestre, la classe ultime ! Linh est un personnage intéressant et j’ai pris plaisir à le voir évoluer et comprendre petit à petit dans quel guêpier il s’est fourré.
Caver Den est un très bon texte, avec juste ce qu’il faut de technologie pour ne pas noyer l’intrigue. Il se lit trop vite et, malgré quelques rebondissements un peu prévisibles mais néanmoins logiques, j’ai vraiment apprécié ma lecture. L’auteur a même réussi à rendre une libellule attachante, je pense que cela mérite d’être noté.
Il va de soi que je vous conseille vivement cette novella.


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jeudi 19 novembre 2015

When Marnie was there

Un roman de Joan G. Robinson, publié chez HarperCollins Children's Books.

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Présentation de l'éditeur : 

When Marnie Was There is a gripping ghost story telling of Anna's strange encounter and friendship with a shadowy girl called Marnie among the wild and watery sand dunes of the Norfolk countryside. Is Marnie real? Shortlisted for the Carnegie Medal when first published in 1967, this is a classic tale with truths to tell about friendship, loneliness and family.

One of Hayao Miyazaki's top 50 favorite books for children, When Marnie Was There, is coming to the big screen with an animated adaptation by his film company, Studio Ghibli, creators of Oscar-winning Spirited Away and Howl's Moving Castle and Arietty, based on Carnegie-winning novel, The Borrowers. This classic ghost story comes back into print to celebrate the film's release, bringing Anna's encounters with Marnie to a new generation of readers.

Quelques mois auparavant, j’ai vu l’adaptation faite par le Studio Ghibli de ce roman pour la jeunesse. Celle-ci m’a plu, mais quelque chose d’indéfinissable m’a empêchée de me laisser totalement emporter dans l’ambiance onirique, un brin fantastique, de l’histoire d’Anna et Marnie. J’avais le roman à portée de main (j’étais censée le lire avant de voir l’anime), et il ne m’a pas fallu longtemps pour l’ouvrir après le visionnage. Cependant, je l’ai lu assez lentement et pas parce qu’il est en anglais. Il m’a laissé une forte impression et celle-ci se mêle à mes souvenirs de l’adaptation. Les deux se complètent à merveille. L’anime possède une dimension onirique plus marquée, mais le roman est à mon sens plus émouvant. Quel que soit le média, l’ambiance est particulière et imprègne le lecteur. When Marnie was there est un récit vraiment singulier. On y fait la rencontre d’Anna, gamine d’une dizaine d’années qui a un peu de mal à communiquer et à trouver sa place au milieu des autres. Elle est envoyée par sa mère adoptive en bord de mer, dans la campagne anglaise, pour soigner son asthme et leur donner du recul à toutes les deux. Elles n’arrivent pas à se parler, des quiproquos se sont installés, les éloignant plus encore et les deux s’inquiètent, sans parvenir à crever l’abcès. Ce dépaysement va faire du bien à Anna, lui permettre d’en apprendre plus sur elle-même et de s’ouvrir aux autres. C’est à la fois un de ces récits de vacances qu’on apprécie enfant et une histoire plus subtile, chargée de mélancolie et de nostalgie. Les secrets empoisonnent parfois l’existence. Anna se sent mal et ne sait même pas pourquoi. Elle pense n’être pas aimée, se sent monstrueuse parfois, comme si elle devait cacher aux autres qu’elle n’est pas comme eux, sans savoir ce qu’elle serait alors. Elle a oublié ce qu’elle cherche désespérément et en devient très émouvante. Et puis elle rencontre Marnie et alors tout commence à changer… En cours de lecture, je me suis souvent demandé si j’aurais apprécié ce roman de la même façon sans connaître à l’avance le nœud de l’intrigue. Cela a contribué à me faire progresser très lentement dans l’histoire. J’ai versé une larme à un moment, ce qui m’arrive rarement, justement parce que je savais quelque chose qu’Anna ignorait. J’imaginais son désarroi alors qu’elle ne comprenait pas ses propres agissements. Elle avait oublié ce qui motivait ses actes, cela était caché très loin dans son inconscient. Cette scène restera gravée dans ma mémoire. J’ai vraiment apprécié cette lecture, même si j’ai été un peu déçue par la façon dont l’intrigue se dénoue. C’est trop facile de présenter les choses de cette façon et du coup ça rend le tout un peu artificiel. Ce roman se lit facilement. Il n’existe pas encore de version française (cela peut changer si l’anime a du succès), et même s’il date d’une époque où l’on ne craignait pas d’avoir un vocabulaire varié dans les livres pour enfants, il est plutôt facile d’accès. C’est un beau un récit d’apprentissage qui explique aux enfants qu’en connaissant son passé, on est plus fort, plus apte à se construire. La nostalgie diffuse qui imprègne ces pages a un certain charme. J’ai aussi beaucoup apprécié la postface écrite par la fille de l’auteur qui, à sa façon, apporte une touche de magie supplémentaire au roman.

Vous pouvez lire ici ma chronique de l'anime.

mardi 17 novembre 2015

Glissement vers le bleu

Un roman SF de Robert Silverberg et Alvaro Zinos-Amaro, publié chez ActuSF.


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Présentation de l'éditeur :


Hey-ho ! Hey-ho ! Écoutez la terrible chanson de la Fin des Temps !


777e année du 888e cycle de la 1111e Circonvolution du Neuvième Mandala.
L’univers se refroidit et glisse vers le bleu. Dans l’immensité de l’espace, l’antique berceau de l’Humanité file vers son funeste destin et les Terriens, seuls dans les milliers de galaxies à vivre éternellement, doivent s’habituer à l’idée de leur disparition prochaine.
Mais il est dit qu’un Roi sans Royaume pourrait bien changer le sort de l’univers. Et si c’était Hanosz Prime, qui vient justement d’abandonner ses titres et sa planète pour venir à la rencontre des légendaires seigneurs de la Terre, et trouver la réponse à cette obsédante question : Comment réagit un immortel face à l’imminence de sa mort ?


Écrit à quatre mains, Glissement vers le bleu est un conte doux-amer sur la chute de la civilisation humaine. Robert Silverberg, auteur rôdé à tous les exercices de style à qui l’on doit quelques chefs-d’œuvre de la science-fiction tels que Le Cycle de Majipoor, L’Oreille interne ou encore Les Monades urbaines, entraîne dans un jeu de cadavres exquis un Alvaro Zinos-Amaro qui se coule avec bonheur dans ce récit post-moderne teinté d’ironie malicieuse.



Glissement vers le bleu est un ouvrage un peu particulier, en forme de… Eh bien, en forme de mandala, tout en circonvolutions (vous comprendrez vite en le lisant). Il est composé de deux novellas, écrites par deux auteurs différents, qui ensemble forment un roman.
Comme cela est expliqué dans la préface, il est né de la volonté d’un directeur de collection de rapprocher les écrits de jeunes auteurs de SF d’autres déjà connus. C’est un peu une sorte de parrainage. Pour ce projet, Silverberg a repris un texte qui lui tenait à cœur mais qu’il avait abandonné, sentant bien que celui-ci n’allait nulle part. Il en a extrait le meilleur, l’a retravaillé. Ainsi est née la première novella, à son co-auteur de se débrouiller avec ça.
Je suis assez peu familière de l’œuvre de Silverberg, mais pas néophyte non plus, par contre je n’avais jamais rien lu d’Alvaro Zinos-Amaro et je dois dire qu’il s’est brillamment tiré de cet exercice difficile. Son travail est admirable de minutie, aucun détail du texte de Silverberg ne lui a échappé.
Il a produit une suite qui reste dans l’esprit de la première novella, tout en prenant ses aises, parvenant à maintenir une continuité de ton chez le narrateur sans imiter Silverberg. La variation dans le style est bien là, mais ne dissone pas. On sent le changement sans le sentir… Mais avec ce roman, vous ne serez plus à une contradiction près.
L’univers tout entier glisse vers le bleu. Il se dissout. Et un narrateur, qui semble bien au fait de ces temps futurs nous le raconte à nous, lecteurs du XXIe siècle, avec un luxe de circonlocutions et d’effets de répétitions qui rappellent les chants des troubadours, donnant à l’histoire un petit côté sans âge. On prend un fil, on tire dessus puis on le lâche, on le reprendra plus tard… Les paroles tournent autour du lecteur, tout à fait dans l’esprit de ce qui lui est conté. Et l’univers glisse néanmoins, petit à petit, alors que se dessine le dernier mandala…
Les deux parties sont intéressantes. Silverberg met tout en place, nous hameçonne, nous balade, léger ou grave quand il le faut. Et Zinos-Amaro reprend toutes les pistes laissées par son prédécesseur de façon intelligente autant que personnelle. Il fait siens histoire et personnages. Son humour acéré se fait l’écho de celui, plus cabotin, de son co-auteur.
Cependant, la fin ne m’a pas spécialement plu. Elle est tout à fait logique, sans se révéler totalement prévisible, mais je ne sais pas, il m’a manqué quelque chose. Elle démontre pourtant avec quel soin méthodique Zinos-Amaro a relié tous les fils au passage, se servant même de détails du début qu’on a pu oublier en cours de route. C’est une collaboration on ne peut plus réussie.
Glissement vers le bleu offre plusieurs niveaux de lecture. Je le vois personnellement comme un conte philosophique sur la muabilité des choses et il m’a en tout cas donné à réfléchir.


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jeudi 12 novembre 2015

Willow Hall

Un roman graphique de Cécile Guillot et Mina M, publié aux éditions du Chat Noir.

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Présentation de l'éditeur : 
Willow Hall… Les murs semblent me chuchoter des prières que je ne comprends pas… Les ombres s’allongent, chaque coin paraissant cacher quelque monstre à l’affut… Tout ici n’est que ténèbres et désespoir. La fillette dont je dois m’occuper reste plongée dans un silence indifférent. Elle est parfois entourée d’étranges papillons sortis de je ne sais où… créatures magnifiques mais qui m’arrachent à chaque fois un frisson involontaire.
Willow Hall est un superbe ouvrage relié, avec jaquette, issu de la collaboration de Cécile Guillot pour le texte et Mina M pour les illustrations.
Le récit nous est conté par le biais de lettres rédigées par Emily, jeune gouvernante fraîchement entrée au service de la famille Andrews. J’ai beaucoup apprécié cette narration épistolaire. La jeune femme écrit à son fiancé, agrémentant parfois son courrier de coupures de presse découvertes dans le grenier. En tâchant d’apprivoiser Lorena, l’enfant dont elle a la charge, elle découvre petit à petit le passé troublé de cette famille et n’a personne avec qui en discuter. Découvrir ses pensées au travers de sa correspondance permet de s’imprégner de l’intrigue, mais à distance, comme si on observait les événements du coin de l’œil. La subjectivité du personnage n’est pas dérangeante, au contraire elle prend part à l’atmosphère, lui conférant davantage de mystère. Pourtant l’étrangeté de Lorena pourrait facilement s’expliquer. Les tourments dans lesquels Emily se débat paraissent nimbés d’une certaine poésie quand elle s’égare à les conter.
La gouvernante, seule dans cette maison auprès d’une enfant qui ne communique pas, aurait-elle les nerfs qui lâchent ? Y a-t-il une malédiction qui pèse sur le manoir au saule pleureur ?
Les illustrations sont vraiment magnifiques. Elles apportent beaucoup au texte, complétant à merveille la brièveté des lettres. Elles happent le lecteur, lui font ressentir la froide épaisseur du brouillard, l’atmosphère oppressante du manoir, et entrevoir les personnages éthérés qui évoluent parmi les ombres.
Cet ouvrage m’a beaucoup plu et je le recommande à tous les amateurs de Gothique et de Fantastique à l’ancienne.
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